Les réformes de grande envergure des années 80 ont assaini le système bancaire et financier de l’économie sénégalaise et ont doté le pays d’une politique monétaire et de crédit censée être davantage adaptée aux réalités. Dans ce pays en émergence en dépit d’une croissance économique soutenue depuis la dévaluation du FCFA en 1994, les banques et établissements de crédit tentent de se faire une place notamment pour lutter contre la précarité.

Le rôle du système bancaire et financier dans l'économie sénégalaise - les enjeux
Les enjeux du système bancaire et financier dans l’économie sénégalaise

Le rôle encore très en retrait des banques dans l’économie sénégalaise

Au Sénégal, le taux de financement des banques dans l’économie s’élève à 34,2%. Ce taux est en net retrait en comparaison à ceux du Maroc ou de l’Afrique du Sud qui caracolent à plus de 60%. Ce constat est d’autant plus surprenant que le secteur bancaire sénégalais affiche un réel dynamisme. Le pays totalisait en juin 2019 pas moins de 25 banques, 4 établissements financiers, 29 établissements de crédits, 540 guichets automatiques, plus de 1 600 000 comptes bancaires ainsi qu’un montant des dépôts et emprunts évalué à près de 7,6 milliards d’euros (5031,4 milliards FCFA). Sous ces belles performances se cache cependant une réalité moins brillante.

 

La difficulté d’accès au crédit pour les entreprises

La question de sous-financement des entreprises est une question clé en Afrique, particulièrement dans les pays de l’UEMOA où elle rime avec la sur-liquidité du système bancaire. Le système bancaire de l’UEMOA et tout particulièrement du Sénégal connaît un excès de liquidités. Les banques dakaroises affichaient en janvier 2019 un bilan dépassant les 11 milliards d’euros soit 9,8 points de plus qu’en 2018.
Le problème réside dans le mode de recyclage de ces liquidités qui ne permet pas pour le moment de financer de manière efficace l’économie. La maturité courte des dépôts entraine pour les banques un problème de transformation des liquidités en prêt à long terme. Cette épargne « dormante » nuit au financement d’activités productives et au soutien au développement d’entreprises porteuses de croissance. Lorsque les banques s’engagent, elles le font avec les taux d’intérêt si élevés que seul le secteur tertiaire peut en profiter.

Au Sénégal, on estime que 92% des micro-entreprises et 90% des petites entreprises font face à des difficultés de financement. En dehors des PME, les difficultés d’accès au crédit touchent aussi une large partie du secteur privé. Les prêts accordés à ce secteur représentent seulement 15 % du PIB. Ce taux est relativement faible en comparaison de celui de l’Asie du Sud (27%) et des pays à haut revenu où le taux flirte avec les 109 %

L’espoir que cette épargne serve des investissements productifs ne pourra se réaliser qu’avec la création d’un système financier plus diversifié, d’institutions financières performantes et la mise en place de réformes économiques visant à favoriser la collecte et la distribution de l’épargne longue.

 

Des améliorations en perspective, des efforts entrepris

Le financement de la phase 2 du Plan Sénégal Émergent

La masse de liquidités du secteur bancaire atteste de la bonne santé de l’économie sénégalaise qui dispose de moyens suffisants pour financer son économie notamment dans le cadre de la phase 2 du Plan Sénégal Émergent. Pour rappel, la phase 2 s’étalant sur la période 2019-2023 vise à consolider les acquis de la première phase dont l’objectif est de réaliser plus 700 projets pour un montant total de 24 Mds USD, avec la mobilisation importante du secteur privé.
Pour mener à bien tous ces projets la mobilisation des liquidités doit impérativement s’accompagner de nombreuses réformes du système et de l’administration fiscale, de réformes structurelles et sectorielles.

La lutte contre l’inclusion financière et la mise en avant de la Micro-finance en tant qu’instrument de lutte contre la pauvreté

Une grande partie de la population reste encore à l’écart du crédit bancaire. En effet, les réformes des années 80 ont supprimé les institutions nationales de crédit peu rentables. Elles ont, par voie de conséquence, exclu une partie non négligeable de la société sénégalaise sans revenus ou rejetée par le secteur bancaire classique faute de pouvoir apporter de solides garanties (salaire, bien immobilier, parcelle de terrain…). Une économie moderne implique de conséquents besoins en capitaux et un système de financement adapté qui ne peut reposer uniquement sur le système bancaire. La réponse sénégalaise passe une revalorisation de la micro finance (micro-crédit) qui permet aux couches les plus modestes de la population d’accéder à des financements sur-mesure (crédits de faible montant) et de participer ainsi comme les autres à l’économie nationale.
Des dispositifs sont mis en place pour lutter contre l’exclusion bancaire et financière. La diversification des services financiers fait partie du Plan Sénégal Emergent destiné à accélérer le développement économique du pays à l’horizon 2035. Le secteur financer devrait ainsi augmenter durablement son potentiel de croissance et favoriser les initiatives du secteur privé pour répondre aux attentes des populations défavorisées.

L’essor des Systèmes de Financement Décentralisés

La mise en avant de la micro-finance a donné naissance aux SFD ou Systèmes de Financement Décentralisés qui sont des institutions dont l’objectif premier est d’offrir des services financiers à des personnes qui n’ont généralement pas accès aux opérations des banques et établissements financiers. Ces structures financières dont le fonctionnement est réglementé selon un cadre juridique défini par la Loi n° 95-03 du 5 Janvier 1995 et sur décret d’application n° 97-11-06 du 11 Novembre 1997 ont vu le jour au Sénégal à partir des années 90.

Aujourd’hui, on dénombre plus de 800 SFD reconnus (mutuelles de base, groupements d’épargne et de crédit et structures signataires de convention). Ces structures proposent des services et produits financiers sous forme de crédits à moyen et long terme à des populations actives à divers niveaux et secteurs de l’économie nationale et contribuent ainsi à la croissance économique et à la lutte contre la pauvreté.