Au Sénégal, les acteurs de l’économie sociale et solidaire, qui sont toujours plus nombreux, militent activement pour obtenir des statuts juridiques sur le modèle européen. C’est dans ce contexte que le pays de la Teranga a officiellement proposé sa candidature pour l’organisation du Forum mondial consacré à l’ESS. Une manière sans doute pour la ville de Dakar de faire un pas en avant vers la reconnaissance de cette évolution économique désormais incontournable. Rappelons à ce titre que Dakar n’a rejoint le Forum mondial de l’économie sociale et solidaire qu’en juin 2020.
La question de l’économie sociale et solidaire irrigue l’histoire des pays depuis de nombreuses années. Vers la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle, il était surtout question de protection sociale, de développement de l’éducation et des loisirs, sans-même évoquer la question de l’organisation et de la production des ressources durant la guerre. On se souvient notamment des mouvements ouvriers, qui se sont mobilisés massivement pour améliorer leurs conditions de travail face à l’essor du capitalisme.
Depuis 50 ans environ, les préoccupations se sont déplacées vers une meilleure prise en compte de l’environnement et de notre rapport à celui-ci. Ainsi, l’économie sociale et solidaire cherche désormais à éduquer les nouvelles générations à l’environnement, ainsi qu’à leurs pratiques de consommation – on favorise désormais des politiques de recyclage, les énergies vertes ou encore les circuits courts. C’est dans ce contexte que l’économie sociale et solidaire a tout naturellement trouvé sa place depuis quelques années, au sein de mouvements tels que les forums sociaux mondiaux (FSM). Ces espaces représentent ainsi de formidables opportunités de convergence des mouvements. L’économie sociale et solidaire peut donc ainsi cohabiter avec d’autres mouvements essentiels, tels que les mouvements des femmes, les mouvements syndicaux ou écologistes.
Le Sénégal et la question de la solidarité au premier plan
L’Afrique a une longue histoire avec l’économie solidaire et sociale. On pourra ainsi remonter jusqu’en 1222 et l’établissement de la Charte du Mandé qui instaurait les premiers droits fondamentaux dans cette région du monde. L’initiative est d’autant plus impressionnante pour cette époque qu’elle intervient près de 7 siècles avant la proclamation de la déclaration universelle des droits de l’homme ! Elle fut par la suite inscrite sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO.
En Afrique de l’Ouest, il existe depuis longtemps une culture de l’économie sociale et solidaire, par le biais de multiples acteurs. On pense bien sûr aux syndicats, mais aussi aux mouvements de promotion de l’entrepreneuriat féminin ainsi qu’aux organisations de producteurs ruraux. A côté de cela, on peut également s’étonner de voir émerger certaines initiatives populaires telles que le micro-crédit, la finance solidaire ou le commerce équitable. Sur le plan de l’économie sociale et solidaire, on peut dire que le Sénégal peut largement compter sur ses forces vives. En effet, les entreprises collectives représentent une part importante de l’ESS et favorisent ainsi une plus grande dimension inclusive. Finalement, les pouvoirs publics auront progressivement pris en compte cette dimension, notamment à travers le Plan Sénégal Emergent (PSE), adopté en 2014 et qui devrait être totalement opérationnel à l’horizon 2035.
Une candidature attendue au Forum Mondial de l’ESS
C’est donc tout naturellement que la ville de Dakar tente sa chance auprès du Forum mondial de l’économie sociale et solidaire, connu aussi sous l’appellation de « Global Social Economy Forum ». Le maire de la capitale sénégalaise a officiellement lancé la candidature de la ville pour l’organisation de cette véritable institution politique, pour la session 2023. Soham Wardini estime ainsi que Dakar est en bonne position pour accueillir la sixième édition du forum. L’édile insiste sur la « bonne connaissance de l’économie sociale et solidaire de la ville, qui peut être portée en exemple face aux six villes concurrentes ».
Pour donner toutes ses chances à la ville d’accueillir ce rendez-vous incontournable, une campagne de promotion est sur le point d’être organisée sur l’ensemble du continent africain. De nombreux soutiens sont d’ores et déjà venus s’ajouter à cette candidature, comme par exemple l’Association des maires du Sénégal et de l’Union des associations des élus locaux. Le maire de Gaya, ville située au nord du Sénégal dans le département de Dagana, se félicite ainsi que la ville de Dakar devienne « une véritable vitrine, une locomotive ».
Pour découvrir quelle ville hôte a été sélectionnée, il faudra patienter jusqu’au 4e trimestre 2021. Le quatrième forum mondial de l’économie sociale et solidaire prévu du 4 au 8 octobre à Mexico devrait faire une annonce en ce sens. Rappelons que la ville de Dakar concourt actuellement avec d’autres villes telles que Casablanca, Rabat au Maroc et Johannesburg en Afrique du Sud.