Fondée par les Américains Drew Durbin et Lincoln Quirck, Wave Sénégal est une start-up qui s’est donnée pour objectif de révolutionner le marché du Mobile money en Afrique. Elle est depuis quelques années, présente au Sénégal, en Côte d’Ivoire, au Burkina-Faso, au Ghana, au Nigéria, en Tanzanie, au Kenya et au Rwanda. Mais c’est au Sénégal, où elle opère depuis 2018, que son ambition de fournir des services disruptifs va le plus faire écho et bousculer les opérateurs historiques.

Des frais de transaction historiquement bas grâce à Wave Sénégal

Depuis son arrivée en 2018 , la start-up Wave Sénégal a plutôt été discrète, jusqu’en 2021 où elle a réussi à lever 200 millions de dollars lors d’un tour de table de série A, ce qui a porté sa valorisation à 1,7 milliards de dollars. C’était alors la levée de fonds la plus importante pour une entreprise établie en Afrique depuis 11 ans.

Grâce à ce financement, la société a accéléré son plan de développement, qui consiste principalement à rendre davantage accessible le mobile money en Afrique, surtout dans un contexte africain de faible bancarisation.

Au Sénégal, cette politique s’est traduite par l’application de frais de transaction entre particuliers s’élevant à 1%, ce qui est beaucoup plus accessible pour les populations. En ce qui concerne les services de paiement de factures, Wave Sénégal a réussi à reporter les coûts sur les entreprises. Ainsi, les utilisateurs ne payent aucun frais. La conséquence directe de ces tarifs bas est que l’entreprise a eu une croissance moyenne de 15 % par mois, l’année dernière. Une croissance qui devrait se poursuivre et augmenter cette année ainsi qu’au cours des prochaines années, selon les analystes.

Wave Sénégal VS Orange Money au Sénégal
Wave Sénégal VS Orange Money

La mesure qui consiste à baisser drastiquement les frais de transaction a d’ailleurs le don de s’attaquer frontalement aux opérateurs historiques présents sur le marché des services financiers numériques. Pour un retrait de 5 000 francs, Orange facturait 350 Francs en 2016. Avec la situation actuelle sur le marché, les frais sont passés à un niveau historique de 50 francs pour la même somme retirée.

Orange, qui contrôle au moins 50% des parts de marché et qui en est le leader, a été le plus affecté. L’année dernière, ses revenus issus du mobile money ont baissé de plus de 4%. Une dégringolade qui s’est accentuée au premier trimestre de cette année, selon des sources proches de la société rapporte Jeune Afrique.

Aujourd’hui, la société estime être le plus grand opérateur de mobile money au Sénégal avec plus de la moitié des adultes du pays, soit entre 4 et 5 millions de personnes, qui constituent ses utilisateurs les plus actifs sur une base mensuelle. Dans le pays, l’application Wave a été téléchargée plus de 5 millions de fois sur le Google PlayStore, indique Tech Crunch.

Comment réagit la concurrence ?

Avant l’arrivée de Wave Sénégal , Orange Bank était le leader incontesté sur le marché sénégalais du mobile money. Un marché sur lequel il trônait avec Free et Expresso. Les entreprises de la Fintech ne se partageaient qu’une très maigre partie du gâteau.

Face à la croissance de Wave, qui au passage lui a arraché des parts de marché importantes, Orange n’a eu d’autres choix que de réagir. Elle a donc été contrainte de s’aligner en baissant ses tarifs de près de 80 % pour tenter de maintenir sa clientèle en forte baisse. Malgré cela, elle se retrouve avec des utilisateurs mécontents qui estiment avoir été abusés avec des frais trop élevés pendant de nombreuses années.

Wave vs Orange

Au même moment, certains responsables d’Orange restent mécontents et dénoncent les dégâts du business modèle de Wave. « Le modèle de Wave est disruptif parce qu’il est financé par des fonds de capital-risque peu attachés à la rentabilité à court terme. Ils investissent de l’argent en espérant que la start-up arrivera à prendre tout le marché et qu’à ce moment-là, ils pourront revendre leur part en récupérant 10 à 15 fois leur mise initiale. Cela ressemble au modèle d’Amazon : on brûle du cash. Cela a duré plus de dix ans pour le site d’e-commerce, en espérant tuer la concurrence », a expliqué Ndiaye Alioune, patron d’Orange. Selon le responsable qui a également été en charge de direction d’Orange Mali, Wave Sénégal détruit le tissu économique du pays par ces méthodes.

« Orange Money Sénégal a créé des dizaines de milliers d’emplois par le biais de son réseau de distributeurs que nous avons développé pour amener nos services au plus près de nos clients. La moitié du chiffre d’affaires leur revenait. Wave leur a fait perdre 50 % de leurs revenus », a-t-il poursuivi.

Ce dernier estime également que cette stratégie de Wave à fait perdre plus de 2 000 emplois au Sénégal et pourrait avoir plus de dégâts, à l’avenir.

Mais la directrice régionale de Wave Sénégal, Carine Sène n’est pas restée sans commenter ces accusations. « Vous avez remarqué que nos concurrents qui estimaient nos tarifs très faibles ont aligné les leurs sur les nôtres. Cela veut dire qu’ils viennent de voir ce que nous avions avant eux en termes de business model », a-t-elle affirmé selon des propos rapportés par Jeune Afrique.

Une guerre ouverte dans laquelle dans laquelle l’utilisateur final aura trouvé son compte, celui de l’accessibilité des frais de transaction sur les opérations de mobile money.