Le Sénégal et son voisin frontalier le Mali expriment depuis longtemps d’excellentes relations diplomatiques, vitales à la croissance économique de cette région. Récemment encore, le secrétaire général des acteurs portuaires du Sénégal, Mamadou Corsène Sarra a réaffirmé l’importance des transports de marchandises, notamment ses camions maliens, essentiels au dynamisme de l’économie sénégalaise. Au total, ce sont près de 253 milliards de francs CFA qui intègrent chaque année les recettes de l’Etat. Une situation exceptionnelle, qui amène cependant à mieux réfléchir la sécurité des professionnels et des usagers de la route, trop souvent victimes d’accidents dramatiques.

Le port de Dakar, principal site d’approvisionnement pour le Mali

Le Port de Dakar est considéré par les acteurs politiques de la région comme le premier et principal point d’approvisionnement pour le Mali. Les échanges commerciaux par voie terrestre entre le Sénégal et le Mali voient ainsi circuler quotidiennement pas moins de 1 000 véhicules lourds sur le trajet Dakar-Bamako (ce qui représente tout de même une distance de 1 350 km). A l’inverse, ce sont près de 300 à 400 camions qui quittent le port de Dakar pour le Mali tous les jours.

Au total, ce sont près de 4 millions de tonnes de denrées qui circulent annuellement entre les deux pays frontaliers grâce aux camions Maliens et Sénégalais. Selon les données avancées par la Banque centrale des Etats d’Afrique de l’Ouest (BCEAO), premier fournisseur communautaire du Mail, les exportations sénégalaises représentaient fin 2019 environ 19% des importations totales maliennes.

Le 18 août 2021, Mamadou Corsène Sarr, secrétaire général des acteurs portuaires sénégalais faisait la promotion des échanges commerciaux opérés avec le Mali : « au total, ce sont quelque 253 milliards FCFA (soit la somme de 451 millions USD) qui entrent quotidiennement dans notre pays, […] ce qui pose la question des flux de camions qui entrent au niveau du Sénégal et l’importance de réfléchir à des solutions de contournement ». Cette déclaration intervient en effet suite à un accident tragique survenu quelques jours auparavant le 15 août, au centre-ville de Kaolak. Quatre personnes avaient alors été tuées dans une collision entre un taxi et un camion de transport de marchandises, immatriculé au Mali. L’accident avait également fait un blessé grave. Des émeutes ont fait suite à cet évènement tragique, auxquelles les autorités ont tenté de répondre par l’apaisement.

253 milliards dans l'économie Sénégalaise grâce aux maliens !
crédit image : Pulse.sn

Collision entre transporteurs : un évènement tragique qui tourne à l’émeute

Suite à cet accident, les victimes ont pu faire l’objet d’une identification : selon les éléments recueillis par Seneweb, trois hommes et une femme étaient impliqués : Gilbert Diouf, Mariama Camara, Abdoul Rakhmane Warr et le chauffeur du taxi, Ndiaga Ndao. Le chauffeur du camion malien a été quant à lui placé sous mandat de dépôt. Le mis en cause, jugé le 25 août dernier, a avoué s’être endormi au volant.

Contacté par les journalistes de la chaîne francophone France 24, le rédacteur en chef du média local Kaolack Infos Moustapha Mbow fait état d’un contexte sinistre : « Kaolack est une ville carrefour où stationnent beaucoup de transporteurs qui quittent le Mali pour aller vers le port de Dakar. On observe donc régulièrement des accidents impliquant des poids lourds en provenance du Mali, et qui sont pour la plupart dans un état de vétusté avancé. Mais cette fois, c’est la violence du choc qui a révolté les gens. C’est un peu un ras-le-bol. C’est la première fois qu’un accident de la route dégénère en émeute. Le camion avait littéralement roulé sur le véhicule ».

Contourner les grandes villes et mieux réglementer la circulation

Suite à cet évènement dramatique, les premières déclarations officielles arrivent en provenance de la délégation du port autonome de Dakar. Celle-ci se composait, entre autres, du directeur général des entrepôts maliens au Sénégal, Fousseynou Soumano, et du représentant du PAD à travers la cellule intervalle, Abdoulaye Seck. Une première réflexion sur la nécessité de repenser la circulation est engagée, par la voix de Mamadou Corséne Sarr : « Aujourd’hui, il est bon que l’on commence à réfléchir sur les voies de contournement des grandes villes comme Kaolack et Tambacounda. Près de 1 000 camions maliens qui viennent au Sénégal, cela représente un flux énorme de poids lourds qui entrent au niveau du Sénégal. Il faut impérativement contourner les grandes villes, c’est un début de solution que nous mènerons entre nous, les autorités du Sénégal et le Mali ».

Au-delà même de la question du contournement, l’aménagement d’aires de stationnement sur le trajet Dakar-Bamako fait également l’objet d’une réflexion. Le directeur général des entrepôts maliens au Sénégal, Fousseynou Soumano, estime ainsi que cette solution « permettrait de réglementer la circulation sur le corridor en terme de volume horaire et de standard ».